Le bourdonnement résonne encore aux tympans de ceux qui le généraient.
Un bourdonnement informe pour les non-initiés, ce bourdonnement que créaient les multiples activités de productions, de maintenances ou de supports.
C’était une ruche. Les générations d’ouvriers s’y succédaient pour produire la richesse qui nourrissait l’ensemble et les apiculteurs.
Chacun savait réagir à la moindre alerte, le bruit d’une casse papier, le cliquetis de plieurs mobiles, de cames mal réglées, de courroies aspirantes sur la cellophane, l’énorme bruit de la scie coupant les slabs, du sifflement d'une lame de massicot tranchante pénétrant le papier... C’était hier, comme longtemps auparavant. Les décennies n’avaient en rien changé la volonté des êtres, même si les menaces inquiétaient. L’espérance d’un lendemain meilleur, d’une reconnaissance de la qualité du travail et des produits, l’espoir d’un possible renouveau…
Marchants entres les bâtiments dans les nuits froides de l’hiver ou aux aurores d’un mois de juin, les êtres allaient faire avec talent ce qu’était leur tâche. Partir de produits basiques pour produire de la richesse dans un produit fini reconnu de qualité.
Mais au fil des ans, les apiculteurs sont devenus des ogres… Ce qui était un centre de création de richesses est devenu dans leurs mots un « centre de coûts ». Ceux qui produisaient devaient produire toujours plus avec de moins en moins de mains, de moins en moins de rayons dans une ruche de moins en moins bien entretenue.
Alors, les ogres ont ouvert des ruches plus grandes, avec des abeilles moins exigeantes, permettant de satisfaire encore mieux leurs appétits sans limite.
Rien n’étanche la soif de ces gens-là. Qu’est-ce qui pousse des millionnaires à vouloir encore plus de millions ?
Une forme de dépendance à une substance nommée diversement, argent, fric, pognon, dividende… Moins de miel pour nourrir le petit peuple, mais toujours plus de gelée royale pour cette caste de nantis.
Aujourd’hui, le seul bruit qui est encore perçu est celui du vent balayant un No Man’s Land.
La dernière trace de vie, le seul être resté debout est cet arbre qui trônait à l’angle de l’usine TECH… Ce vendredi 13, ne restait que le quai de l’encollage/mélange pour reconnaitre un morceau de l’usine.
De l’usine Scotch-Brite, il ne reste presque plus rien, chaque heures, chaque coup de pelleteuse semble devoir donner un coup de grâce… Qui viendra, inexorablement…
Ce vendredi 13, je me suis isolé un moment dans l'ancienne cantine, j'ai fermé les yeux pour que la colère n'en coule pas, et j'ai maudit longuement les responsables de ce désastre, ressassé trente huit années passées ici, dont quinze années de militantisme et de lutte pour tenter que cela n'arrive pas...
Cela n'a pas suffit, mais de toute façon, il fallait essayer.
Arrachequesne Daniel 21/01/2020 18:45
FO 3M France 22/01/2020 08:17
Patrick T 17/12/2019 10:09
FO 3M France 17/12/2019 10:24
Daniel 15/12/2019 08:57